Les plafonds de Bayreuth
Au-delà du festival wagnérien, Bayreuth, cette charmante petite ville de Haute-Franconie en Bavière, offre, dans ses monuments, une incroyable palette de plafonds luxuriants.
Si vous n’êtes pas mélomane ou simplement pas grand amateur de Wagner, il est d’autres raisons que l’iconique festival de l’été d’aller à Bayreuth. Une récente visite m’a permis de découvrir de véritables merveilles, que le regard doit chercher vers les hauteurs : ce sont les plafonds des résidences et châteaux ainsi que celui du très bel opéra baroque. Ils sont un festival d’élégance, d’esthétisme et d’audace créatrice.
Dans la gradation des plafonds remarquables, celui de la maison de Wagner est sans doute le plus modeste, même s’il est décoré. Le génie créateur a privilégié ses murs couverts de bibliothèques remarquables. En revanche, il a fait quelques concessions ornementales au rigorisme pour son Palais des Festivals (Festspielhaus). A Bayreuth, le musicien conçut et construisit son opéra dans un esprit de sobriété presque spartiate, afin que le public ne soit concentré que sur l’écoute de la musique. Les sièges qui meublent les 30 gradins de cet amphithéâtre de 29 m de profondeur sont de bois et ne souffrent d’aucun coussin pour éviter que le sommeil ne saisisse les auditeurs à la 3è ou 4è heure de concert… Néanmoins, l’ocre pâle du plafond en bois est rehaussé de dorures et enluminures délicates dans les tons pastel avec au centre des cartouches qui tranchent avec la rigueur de la salle en rupture avec la traditionnelle architecture italienne en fer à cheval. Ajoutons que le public ne peut se réjouir visuellement de l’interprétation, la fosse des musiciens et le pupitre du chef d’orchestre étant dissimulés.

La palmeraie du nouveau palais : dorées à l’or fin, ces palmes enveloppent le plafond d’une salle de banquet
Sobriété, il n’en est guère question, au contraire, dans les résidences des margraves du temps de Wilhemine, femme très cultivée et sœur de Frédéric le Grand, qui à défaut de devenir reine d’Angleterre comme les jeux d’alliance le lui promettaient, épousa le margrave Friedrich de Bayreuth en 1732. Elle va transformer ce gros bourg paisible, loin de la cour, en un lieu de pouvoir intellectuel et artistique de l’époque. Parmi eux, Voltaire fut plusieurs fois son hôte. Nous sommes en pleine « folie rococo ». Wilhemine surpasse tout ce que ses contemporains osent faire. Elle fait construire au cœur de la ville en 1748 un opéra d’une richesse créative flamboyante avec son décor baroque de bois peint unique. Le plafond et ses allégories est certes classique mais remarquable. La visite est complétée par une exposition interactive qui fait vivre ce théâtre baroque. C’est d’ailleurs la renommée de cet opéra qui attira Wagner. Mais il le jugea trop petit et décida de la construction de son palais qui ne sert qu’une fois par an, à l’occasion de son festival.
Quand cette brillante aristocrate habituée aux fastes de la cour s’installa à Bayreuth dans l’Ermitage, ce fut un choc. Elle entreprit avec l’assentiment de son mari de reconstruire, modifier, aménager la résidence. On en revient aux plafonds : celui du cabinet chinois des miroirs où elle écrivit ses mémoires. La multitude de ces petites glaces aux formes fantaisistes reflètent pagodes, jonques et scènes bucoliques qui décorent à l’or fin le plafond crème. Dans le cabinet japonais, le plafond doré met en valeur un bestiaire chimérique assorti de sculptures de lézards et dragons. Dans le nouveau palace, construit en 1753 après l’incendie de l’ancien, Wilhemine s’offrit d’autres folies tel le plafond doré d’un boudoir ou cette longue pièce de réception étonnante avec ces palmes sortant des boiseries qui empiètent sur le plafond en créant l’illusion d’une palmeraie en or fin.
Terminons par le plafond du pavillon oriental de la résidence Sans pareil, décorés de milliers de coquillages. Une vraie curiosité si loin de la mer de voir ces moules, bigorneaux, ormeaux, coques, bulots sans omettre les coquilles Saint-Jacques qui dans leur agencement, forment des visages, des sirènes et des décorations très… rococo.
Patricia-M.Colmant
Pour s’y rendre avion ou train jusqu’à Munich, puis train
Y séjourner :
Hotel Rheingold
Maisel & friends : café restaurant dans une ancienne brasserie et hôtel dont les chambres sont décorées par des artistes contemporains
La table : Post hôtel Alexander Herrmann à Wirsberg





