Le minuscule béguinage d’Anderlecht à Bruxelles

Réouverture d’un minuscule béguinage à Anderlecht, le plus petit de Belgique et de Bruxelles.

Avec la Maison d’Érasme et la collégiale gothique des Saints-Pierre-et-Guidon, le béguinage d’Anderlecht constitue un ensemble historique remarquable et classé au cœur de la commune. Il se compose de deux ailes, à l’architecture datée des XVe, XVIe et XVIIIe siècles, encadrant un jardin clos doté d’un puits. Il pouvait accueillir jusqu’à huit béguines et servit après la Révolution française d’hospice et de logement pour femmes indigentes, ferma en 1928 et, aménagé en musée folklorique et d’histoire locale, rouvrit en 1930.

Débutée en 2010, la restauration du béguinage a été menée par différents partenaires en collaboration étroite avec la Direction du Patrimoine Culturel dans un cadre déontologique rigoureux. La deuxième phase de réouverture du béguinage consistera en un nouveau projet muséal et sera finalisé à l’automne 2023.

HISTORIQUE DU BÂTI

Fondé en 1252 par le chapitre Saint-Pierre d’Anderlecht à une époque où Anderlecht était rurale et peu peuplée, l’ancien béguinage est aujourd’hui un site patrimonial emblématique et exceptionnel à Bruxelles.

Trois grandes périodes le caractérisent : 1. La construction en bois, torchis et chaume de la fin du Moyen Âge (XVe – XVIe siècles) La partie la plus ancienne mise au jour par les recherches est un vestige de bâtiment à pan de bois (colombage), partiellement conservé à l’intérieur de l’aile droite (occidentale) actuelle. L’ossature de bois a pu être datée des années 1435-1460. Une plus petite maison, aujourd’hui disparue et remplacée par la partie nord de l’actuelle aile gauche (orientale), fut ajoutée au bâtiment dans les années 1484-1485. Ce dernier fut ensuite agrandi vers l’ouest au début du XVIe siècle (1511-1513), les deux bâtiments continuant d’être exploités comme lieu de vie principal des béguines jusqu’au début du XVIIIe siècle.

  1. L’architecture en briques et pierre du XVIIIe siècle À cette époque, le béguinage connaît plusieurs phases de transformations qui vont lui donner l’aspect qu’il présente encore aujourd’hui. Le bâtiment à pan de bois est partiellement détruit et remplacé par une nouvelle construction en briques et pierre blanche (aile droite). Seuls sont conservés deux des cinq murs, maintenus comme cloisons intérieures (vers 1719-1720). Dans le même temps, la partie sud de l’aile gauche (dite Chambre de la Grande Dame) est édifiée dans l’axe de la petite maison du XVe siècle, qui fut détruite et remplacée en 1756 par l’actuelle maison formant la partie nord de l’aile gauche.
  2. Le XXe siècle ou le temps des restaurations. Remarquable par son état de conservation, cet ensemble architectural est parvenu jusqu’à nous en dépit de plusieurs campagnes de restauration importantes : la première eut lieu lors de l’ouverture du béguinage comme musée (vers 1930) ; la seconde, dans les années 1970, d’ampleur considérable et particulièrement invasive pour les murs extérieurs en briques et pierre ; heureusement, les structures intérieures en bois furent épargnées. Quant à la troisième restauration, débutée par des études en 2013 et qui s’achève en 2022, elle a été menée dans un contexte scientifique favorable et avec un cadre déontologique plus rigoureux, dans le plus grand respect des structures originales.

La ré-ouverture a eu lieu à la mi-septembre

LES BÉGUINES

Au XIIe siècle, le mouvement béguinal fut créé dans la région de Liège par des femmes cherchant une nouvelle manière d’exprimer leur foi et se propagea dans toute l’Europe septentrionale. Toujours situées dans le voisinage d’une église, les maisons qui les abritaient, réunies en béguinages dont plusieurs ont été conservés, essentiellement en Flandre, pouvaient être nombreuses ; ainsi, le Grand Béguinage de Bruxelles (détruit) était habité par 1200 béguines, celui de Louvain, par près de 200, etc. Après leur nomination par les chanoines et l’acquittement d’un droit d’entrée, les postulantes endossaient l’habit béguinal et intégraient l’une des maisons du béguinage avec leurs quelques biens et argent personnels. Elles y menaient une vie religieuse et orientée vers le caritatif, avec une règle de vie souple et de l’autonomie, sans être cloîtrées ni prononcer de vœux perpétuels. Certaines occupaient même des postes « publics », comme enseignante ou sage-femme. Cette indépendance les rendant bientôt suspectes au regard des autorités ecclésiales, qui intensifièrent leur contrôle. Néanmoins, le mouvement béguinal se perpétua, produisant une œuvre poétique et spirituelle significative.

Un intérieur un peu monacal

Nos connaissances sur le béguinage et les béguines d’Anderlecht datent principalement des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles. Au nombre (maximal) de huit, les béguines, souvent des femmes veuves, célibataires ou âgées, vivaient en communauté dans le béguinage, bien qu’elles devaient disposer vraisemblablement d’une chambre individuelle. C’était des personnes modestes, souvent issues de familles locales (propriétaires terriens, paysannerie aisée) ou évoluant dans l’entourage des chanoines. Sorte d’hospice pour femmes isolées, le béguinage fournissait logement et protection au sein de l’enclos mais les béguines devaient gagner par elles-mêmes leur subsistance. Les sources des XVIe -XVIIIe siècles soulignent en effet l’importance des activités béguinales par rapport à l’Église : les béguines étaient servantes de chanoines ou de dignitaires paroissiaux, exécutaient des petits travaux au profit de la collégiale (couture, nettoyage, quête lors des offices, soins aux religieux malades…), étroitement surveillées par les chanoines qui, en outre, ne se privaient pas de leur imposer une nouvelle béguine de leur choix lorsqu’une place se libérait. La Révolution française entraîna la fin du chapitre et du béguinage d’Anderlecht, ainsi que de tous les autres ordres religieux. Utilisés par la suite comme bureau de bienfaisance et logement pour femmes indigentes, les bâtiments finirent par se délabrer complètement au fil du temps, de sorte qu’ils furent fermés définitivement comme lieu d’habitation vers 1928, avant de rouvrir en tant que musée deux années plus tard.

Musée maison d’Erasme – Beguinage

8 rue du chapelain

1070 Anderlecht – Bruxelles

Belgique

Visuels de J. Ortegat

 

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