Le Belem pour les JO

Prêt pour les JO, le Belem va faire briller la flamme olympique. Encore un destin historique pour ce navire digne représentant de la France sur la scène internationale du sport.

Né sous une belle étoile, voilà une constatation qui sied à la première star des Jeux Olympiques, le Belem, trois-mâts barque à phares carrés (1) qui arrive ce 8 mai dans le port de Marseille. Il a fière allure avec ses mâts de 35 m de haut arborant 22 immenses toiles qui totalisent 1200 m 2. Il fallait bien cela pour traverser l’Atlantique, ses cales chargées à bloc de produits agricoles, sa fonction première lorsqu’il fut mis à l’eau en 1895. C’était l’époque de la belle flotte nantaise qui fit la richesse de la ville bretonne. Les armateurs de la ville, dont Fernand Crouan qui l’a commandé aux chantiers Dubigeon est un des plus entreprenants, gèrent une flotte de près de 150 grands voiliers construits entre 1895 et 1930. Le Belem est le seul rescapé de cette armada.

Et pourtant sa navigation n’a pas toujours été un long fleuve tranquille.

Après une première campagne désastreuse entre tempêtes, incendie, pillage qui entraine des semaines de réparations, la deuxième se termine sous de meilleurs auspices. Son commandant, François Rioual, n’avait que 26 ans. Le Belem, qui doit son nom à ses escales à Para au Brésil, noue alors un contrat d’approvisionnement en fèves de cacao du Brésil avec la chocolaterie Menier, numéro un mondial du secteur à l’époque. Mais un nouveau coup dur frappe le navire au mouillage à Saint-Nazaire en 1898 : il est éperonné par un cargo britannique le Mersario. Retour au chantier.

Quand le Belem était à Marseille

Près de 4 ans plus tard la chance est de son bord lorsqu’arrivant au port de Saint-Pierre, en Martinique, pour y charger sucre de canne et rhum, il est contraint d’aller mouiller à l’anse Robert au nord de l’île. Deux navires ont pris sa place. Dans la nuit du 7 mai 1902, l’éruption volcanique la plus meurtrière du XX è siècle pulvérisera la ville, 30 000 habitants, le port et ses 15 navires marchands en rade.

A la disparition de son armateur, le bateau changera trois fois de propriétaire avant de changer de pavillon. En 1914 il devient britannique. Finit le navire marchand, le duc de Westminster le transforme en yacht. Ses cales sont transformées en cabines. C’est à cette époque que l’arrière de sa dunette est équipé de ses surprenantes balustrades de style victorien. Cette nouvelle vie se poursuit sous le nom de Fantôme II quand Arthur Ernest Guinness, le brasseur irlandais acquiert le navire en 1921. Navigations en Manche, en Méditerranée, de l’Indien au Pacifique, des Antilles au Spitzberg jusqu’en 1937. Désarmé, il restera à Cowes (GB) jusqu’en 1947 et échappera le 5 mai 1942 à un bombardement de la Luftwaffe.

En 1951, l’héritière Guinness le vend à un centre maritime italien. Il adopte le nom de Giorgio Cini et mouille à Venise, dans l’île San Giorgio Maggiore. S’ouvre une période au service de la marine italienne et de la formation de plus de 200 élèves par an qui va durer jusqu’en 1967. Pour des raisons financières, son désarmement est inéluctable. En 1972, la fondation Cini confie le navire aux carabiniers de Venise qui se lancent dans une grande restauration ; mais faute d’argent, ils cèdent le bateau au chantier naval de Venise en 1976. C’est à cette époque que l’Association pour la sauvegarde et la conservation des anciens navires français (ASCANF) grâce au docteur Luc-Olivier Gosse repère que le Giorgio Cini n’est autre que le Belem. Ces passionnés remuent ciel et terre et en janvier 1979, embarquent dans leur projet l’Union Nationale des Caisses d’Epargne qui acquière le navire. Il est remis par les Italiens à la marine nationale française le 15 août avant d’être donné par les Caisses d’Epargne, deux ans plus tard, à la fondation Belem créée aux fins d’exploitation comme navire-école civil après avoir été classé Monument historique.

Depuis 1985, le trois-mâts a traversé à nouveau l’Atlantique à plusieurs reprises avec des stagiaires payants, heureux de découvrir la grande marine marchande à voile, celle du XIX ème siècle, certes modernisée mais respectueuse de l’époque.

Son rôle de porteur de la flamme olympique depuis le Pirée, le canal de Corinthe jusqu’à Marseille vient s’ajouter à la longue liste des grands moments historiques que le Belem a déjà connus.

Patricia-M Colmant et ML de Vienne

 

(1) un phare carré est un gréement de voilier. Chaque mât porte plusieurs étages de voiles, plus ou moins carrées, suspendues chacune à une vergue (pièce de bois longue et ronde arrimée au mât horizontalement). Il peut y en avoir 3, 4 ou 5 comme sur le Belem.

Source : Belem témoin d’hier, acteur d’aujourd’hui par Daniel Gilles, aux éditions du Chêne

Et le château d’If fêtera aussi cette arrivée du Belem par l’exposition :  ‘Flux Marins & Digital Abysses’ de Miguel Chevalier ainsi que des spectacles de danse.

A noter pour votre visite à Marseille que le Sofitel est vraiment le lieu (pour un repas ou une nuit) qui jouit de la plus belle vue sur tout le port et le Mucem.

Pour vous régaler, pensez à L’Epuisette et à son chef Guillaume Sourrieu ; de même le Grand Bar des Goudes fraîchement repris par Benjamin Mathieu mérite une halte gourmande.

www.chateau-if.fr

Visuels de G. Thirion,  AM Wade photography et G. Ganovsky

 

Poulpe au Grand Bar des Goudes

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