Dubuffet et les magiciens : quand l’art brut ensorcelle le Niel – Interview de Jean-Noël Drouin, fondateur du Musée
Alors que le Musée du Niel inaugure sa troisième saison avec une exposition exceptionnelle autour de Jean Dubuffet et des artistes de l’expression singulière, nous avons rencontré Jean-Noël Drouin, son fondateur. Collectionneur passionné, il revient sur la genèse du musée, sa vision de l’art et les coulisses de cette nouvelle exposition aussi puissante qu’inattendue.
Le Musée du Niel, niché sur la presqu’île enchanteresse de Giens, inaugure sa troisième saison estivale avec une exposition vibrante et envoûtante : « Dubuffet et les magiciens. Expressions singulières 1945-2000″.
Au cœur de cette nouvelle proposition, une figure tutélaire de l’art du XXe siècle : Jean Dubuffet. À la sortie de la Seconde Guerre mondiale, il bouscule le monde de l’art en donnant ses lettres de noblesse à une expression jusqu’alors marginale : l’Art Brut. En rupture avec les codes académiques, Dubuffet célèbre la spontanéité, l’instinct, la force brute du geste — une magie nouvelle qui ouvre la voie à d’autres créateurs « singuliers », farouches et visionnaires.
Dans le sillage de cette révolution, les artistes du mouvement CoBrA, venus du Nord de l’Europe, explorent eux aussi un territoire d’expression libre, parfois proche du dessin enfantin ou du monde du rêve. Parallèlement, Michel Tapié, théoricien de « l’art autre », érige ces langages inclassables en manifeste.
De ces élans convergents — et pourtant indépendants — naît un monde parallèle : celui des magiciens, artistes inclassables et fascinants, porteurs d’univers intimes et décalés, qui façonnent une autre histoire de l’art contemporain.
L’exposition réunit 22 artistes hors normes, parmi lesquels :
Jean Dubuffet, Pierre Alechinsky, Aloïse, Jean-Michel Atlan, Enrico Baj, Baya, Pierre Bettencourt, Anselme Boix-Vives, Louis Carmeil, Gaston Chaissac, Constant, Corneille, Dado, Philippe Dereux, Yolande Fièvre, Simon Hantaï, Asger Jorn, Bengt Lindström, Michel Macréau, Maryan, Henri Michaux, Ramon.
Autant de voix singulières qui, entre 1945 et 2000, ont contribué à bouleverser notre regard sur la création.
Un rendez-vous artistique majeur de l’été, entre éclats de couleurs, vertige des formes et souffle de liberté. À découvrir absolument dans ce lieu magique suspendu entre ciel, mer et inspiration.
Entretien avec Jean-Noël Drouin, fondateur du Musée du Niel
« Les peintures ont transformé ma vision du monde »
Jean-Noël Drouin, ancien entrepreneur passionné d’art, a fondé le Musée du Niel sur la presqu’île de Giens. Il y partage aujourd’hui une impressionnante collection dédiée à la peinture de la seconde moitié du XXe siècle.
Comment est née votre passion pour la peinture ?
Très jeune, j’ai été fasciné par l’énergie créative qui a émergé après la Seconde Guerre mondiale, notamment en France et en Europe. Les années 50 à 70 ont été pour moi un véritable laboratoire artistique. Bien avant de devenir collectionneur, je suivais déjà de près le travail de ces peintres qui cherchaient à exprimer quelque chose de neuf, d’audacieux, hors des codes.
Quand avez-vous commencé à constituer votre collection ?
C’est après un long parcours dans le monde de l’entreprise que j’ai eu envie de donner corps à cette passion. J’ai commencé à réunir des œuvres d’artistes comme Olivier Debré, Hans Hartung, Jean Miotte, Maria Helena Vieira da Silva, ou encore Jean-Paul Riopelle. Aujourd’hui, la collection compte près de 200 œuvres et 90 artistes, parmi lesquels figurent aussi Dubuffet, Alechinsky, Calder, Shirley Jaffe ou Poliakoff. Mon objectif est clair : préserver, documenter et faire rayonner ce pan essentiel de l’histoire de l’art moderne.
Pourquoi avoir choisi la presqu’île de Giens pour installer le musée ?
Un peu par hasard… En découvrant ce bâtiment abandonné sur le port du Niel, j’ai tout de suite imaginé en faire un lieu vivant, dédié à l’art. Il fallait un espace à la hauteur des œuvres et un cadre propice à l’évasion. Ici, entre mer et lumière, tout fait sens.
Quel a été l’esprit des expositions précédentes ?
L’exposition inaugurale, Les Chemins de l’Abstraction, en 2023, a permis aux visiteurs de redécouvrir l’intensité de la peinture non figurative. Chaque saison, nous explorons un thème en lien avec notre collection et l’enrichissons grâce à des prêts d’institutions ou de collectionneurs.
Et pour cette troisième saison ?
Nous avons voulu proposer une exposition plus radicale, intitulée « Dubuffet et les magiciens. Expressions singulières 1945-2000″. Elle rompt volontairement avec nos programmations précédentes. À travers 22 artistes hors normes, l’exposition explore des formes de création libre, spontanée, souvent marginale, mais profondément bouleversante. Ces œuvres m’ont transformé, et j’espère qu’elles toucheront les visiteurs avec la même intensité.
Musée du Niel, 6 route du Port du Niel, Presqu’île de Giens, 83 400 Hyères – Tél : 04 94 91 74 22 – www.museeduniel.com
Ouverture du musée : du 3 mai au 2 novembre 2025
Mai-juin-juillet-août : ouvert tous les jours sauf le mardi de 11h à 19h. 15 septembre- 2 novembre : ouvert tous les jours de 10h à 18h excepté le mardi
Tarif Général : 12 euros / Tarif groupe : 10 euros / Tarif Jeunes de 12 à 26 ans : 6 euros / Entrée gratuite : pour les moins de 12 ans
Boutique et librairie en libre accès à l’accueil du musée.
Restauration en continu aux horaires du musée assurée par Le Mérou du Niel en accès libre sur les terrasses supérieures vue mer du musée.
Parking public gratuit 140 places sous le village de Giens.
Source Photos : Musée du Niel et Thierry Lachaux.