Cà va vous en boucher un coing !
Difficile à travailler, le coing est un fruit méconnu, hormis en pâte et gelée de coing. Seuls quelques chefs talentueux et des pâtissiers vraiment chevronnés s’aventurent à proposer des plats et des desserts au coing. Et pourtant le parfum du cognassier et de ses fruits est magique et souvent il nous transporte avec bonheur dans des souvenirs gourmands d’enfance.
Très populaire dans les campagnes, ce fruit, proche de la poire par sa forme et sa peau jaune, est délaissé en ville. Pourtant originaire du Caucase et d’Iran, ce fruit appelé poire de Cydonie était symbole de bonheur et d’amour pour les Grecs et les Romains l’avaient consacré à Vénus, en représentant la déesse avec un coing dans la main droite, cadeau du dieu Pâris.
En France, au Moyen Age il était utilisé en cuisine et en médecine pour remédier aux soucis digestifs. Une diarrhée : « prends de la gelée de coing » conseillait Don Quichotte à Sancho Panchez ! Est ce une des raisons pour se désintéresser de ce fruit bon marché de surcroît ?
Interviewé, Pierre Hermé nous explique de manière plus pragmatique pourquoi ce fruit attire si peu en cuisine. C’est un des rares fruits à ne pas se manger cru et sa chair est tellement dure qu’il faut savoir l’amener à maturité. Son épluchage est difficile et fastidieux ainsi que sa découpe. Avant de le cuire et de le cuisiner, parfois lentement environ10 heures au four ; une pré cuisson à l’eau peut s’avérer nécessaire. Normal donc que certains se découragent face à la tâche !
Les idées de quelques restaurateurs
A Paris, au Grand Hôtel du Palais Royal, le Lulli a mis à la carte par l’intermédiaire de son chef Jean Yves Bournot, un jeune formé par Marx et Alléno, une belle pomme de ris de veau glacée au suc de coing, ravioles de butternuts et mousseline de châtaignes (29 €, 01 42 96 72 20).
En Loir et Cher, aux portes de Chambord et de Blois, Montlivault est un village dont les seuls intérêts étaient les peintures murales XVII ème de son église et le lavoir. Aujourd’hui la petite commune peut s’enorgueillir d’avoir un hôtel dans l’ancien relais de poste (La Maison d ‘à Côté) et surtout un chef, Christophe Hay, dont l’ambition est d’aller loin…. jusqu’aux étoiles. Avec sa pâtissière il a concocté une île flottante au coing caramélisé, crème anglaise, caramel au beurre salé et ache (petite fleur) des montagnes (12 €, 02 54 20 62 30).
Dans le Relais & Châteaux alsacien de La Cheneaudière, c’est Rodrigue Palvadeau, le sommelier, qui intrigue, car il a eu la bonne idée de faire des accords plats et jus de fruits dans le restaurant gastronomique. En liaison avec les 2 chefs en cuisine, maîtres restaurateurs, il propose sur le « duo de foie gras d’oie et foie gras de canard aux épices » un jus de pommes & coings d’un voisin du Bas – Rhin.
S’il n’est pas à la carte en permanence, son dessert, le parfait aux coings confits, compote et gelée de coings biscuit Joconde, est une ode totale à ce fruit (16, 50 €, 03 88 97 61 64 : www.cheneaudiere.com).
L’offre sucrée de pâtissiers hors normes
A Pierre Hermé et à François Perret de rappeler aux Parisiens leurs origines terroir ; tandis qu’en Alsace le coing fait la joie de la reine des confiturières, Christine Ferber, et d’un fou de tartes, Thierry Mulhaupt.
Le Vénus d’Hermé : esthétiquement très réussi avec ses lamelles entrelacées, ce dessert est sublime. Sur un sablé breton, un biscuit garni d’une crème mascarpone fleurie à la rose, un confit de coing et de pomme à la rose et des lamelles de fruits parsemées en corolles. Cuit le coing laisse ici ressortir son parfum naturel de rose, traduction olfactive clairement confirmée par l’ami d’Hermé, le nez en parfumerie Jean Michel Duriez. De par sa nature même, le coing a des notes de rose ! Ultra raffiné ce dessert sera une édition limitée dans le temps : de la mi novembre au 15 décembre. Le gâteau individuel à 7, 30 €, le 6 / 8 pers. à 59 € ; www.pierreherme.com.
Dans l’ancien hôtel particulier du prince Roland Bonaparte, petit neveu de Napoléon Bonaparte, le Shangri-La, superbe palace parisien avec vue imprenable sur la Tour Eiffel ; c’est François Perret qui est aux commandes de la pâtisserie. Tant à la carte que pâtisserie du tea time, sa dernière spécialité au coing est d’une fabuleuse finesse. Il s’agit d’un sablé aux noix, d’une crème légère à la vanille surmontée d’une compotée de coings pochés et de noix caramélisés. Un dessert extrêmement subtile en saveurs (12 €, 01 53 67 19 98).
Le coing semble être apprécié en Alsace puisqu’à Pierre Hermé s’ajoutent deux autres pâtissiers de l’Est, Thierry Mulhaupt et Christine Ferber.
Installé dans le centre historique de Strasbourg, Thierry Mulhaupt vient d’éditer un livre intitulé « Tartes Folles » et il y propose sa tarte aux coings et aux marrons confits. Il n’y a plus qu’à vous lancer dans la recette ( 29 € sur www.nueebleue.com)
Le coing en pré dessert chez René et Maxime Meilleur en Savoie à La Bouitte
Doublement étoilés dans leur hôtel restaurant de La Bouitte, René Meilleur et son fils Maxime proposent un pré dessert (presque un trou savoyard non alcoolisé !) à base de coing. Appelé « eau de coing façon bière + chips de coing »; ce pré dessert est un délicieux jus de coing émulsionné, mousseux en surface pour constituer une écume blanchâtre de bière. L’accompagnent de fines lamelles de coing passées au four et cristallisées.
La Bouitte
04 79 08 96 77
www.la-bouitte.com
Enfin Christine Ferber est la reine des confitures et il est hélas pas toujours facile de trouver ses produits dans d’autres boutiques que sa maison d’origine qui est à Niedermorschwihr. En septembre, elle aussi a fait des tartes associant la crème d’amandes à des coings pochés aux zestes d’orange et épices à pain d’épices. Même si la saison des coings est à l’heure actuelle finie en Alsace ; notre « confiturière » a conservé de côté des fruits pour faire 4 à 5 variétés différentes de pots aux coings. Quel talent de développer ainsi le produit au naturel en gelée et confiture, en gelée et pétale de rose, en coing et pain d’épices. 6, 75 € le pot de 220 g et 8, 75 € en envoi en vpc, port et emballage compris.
www.christineferber.com
Si vous pouvez attendre la fin d’année, les restaurants de Guy Martin dont le Grand Véfour proposeront pour leur bûche de Noël un dessert en forme de bouteille de champagne au coing, mandarine, kaki relevé de Ruinart Rosé. A consommer dans ce restaurant hautement gastronomique !
58 € pour 6 pers. 01 42 96 56 27 (Grand Véfour)